Article de Vie locale - Publié le Vendredi 3 Avril 2015

Intervention de Didier Le Reste sur la Politique de la ville

Le gouvernement a décidé en 2013 de réduire le nombre de quartiers bénéficiant de la Politique de la ville. Cette décision a suscité une grande mobilisation des associations qui interviennent dans ce domaine. Au nom du groupe PCF-Front de Gauche, Didier Le Reste, Conseiller en charge de la Politique de la ville dans le 10e, a multiplié les démarches auprès du ministère pour refuser le désengagement de l’Etat et auprès de la Maire de Paris pour le maintien des engagements financiers de la ville. Une obstination qui a payé et un nouveau contrat de ville pour 2015/2020 a été adopté dans ses grandes lignes. Pour les mois qui viennent, l’objectif est d’élaborer, dans la concertation avec tous les partenaires, les projets de territoires de chacun des secteurs concernés.
  • Intervention de Didier Le Reste, conseiller communiste de Paris, sur la Politique de la ville, lors de la séance du Conseil de Paris des 16, 17 et 18 mars 2015.

La Politique de la ville doit assurer l’égalité entre les territoires et améliorer les conditions de vie des habitants. Pour atteindre cet objectif, le groupe PCF/Front de Gauche a fait adopter un premier vœu portant sur la nécessité de renforcer les services de la ville avec les moyens humains nécessaires à sa bonne mise en œuvre. Le second vœu demande à ce que le délai d’élaboration des projets de territoires soit repoussé de quelques mois afin de laisser le temps à une concertation avec les habitants.

 

Intervention de Didier Le Reste, Conseiller communiste de Paris lors du Conseil de Paris des 16, 17 et 18 mars 2015

 

La présentation du contrat de ville aujourd’hui soumis au vote du Conseil de Paris est l’aboutissement de nombreux mois de travail, d’échanges, de négociations parfois, avec nos différents partenaires associatifs et institutionnels dont l’Etat.

Je ne souhaite pas aujourd’hui faire l’historique de tout ce travail, ni entrer dans le détail de chaque fiche-action, mais je souhaite parler, dans cette période particulière, dans cette période de crise sociale et économique du sens que l’on donne à la politique de la ville et à l’action publique dans les quartiers les plus en difficultés. 
La Politique de la ville est trop souvent incomprise ou volontairement négligée. La critique est facile, que ce soit pour dire que rien ne change ou au contraire pour demander à la Politique de la Ville de résoudre tous les problèmes.

L’apogée est bien sûr Fox news qui est allé jusqu’à nous expliquer que les autorités publiques désertaient le terrain dans les Zones Urbaines Sensibles !
D’entrée de jeu, l’introduction du contrat de ville reprécise l’objectif politique central, je cite :

« La double finalité de la Politique de la ville est d’assurer l’égalité entre les territoires et d’améliorer les conditions de vie des habitants des quartiers en difficultés ».

Il ne s’agit pas de stigmatiser des quartiers ou pire les parisiens qui y vivent, 
Il ne s’agit pas exclusivement d’évoquer la territorialisation de la pauvreté, ce qui serait trop simplement résolu en déplaçant les pauvres au-delà du périphérique. Il s’agit de dire que nous savons que les inégalités sont territorialisées et que nous allons tout mettre en œuvre pour tendre malgré les inégalités, vers l’égalité républicaine.

En résumé, Paris doit investir le plus là où les Parisiens ont le moins. 
A Paris comme ailleurs il y a des quartiers aisés et d’autres où les difficultés se cumulent : chômage, mal-logement, échec scolaire, précarité, addiction, famille monoparentale, non recours aux droits etc…

Pour compenser ces écarts, Paris agit sur deux volets, dans une double démarche :

premièrement, une politique spécifique pour les quartiers, au plus près des besoins individuels ou collectifs : quartier par quartier, rue par rue, au hall d’immeuble près. 
Pour pouvoir répondre dans le détail aux projets qui parfois nécessitent seulement 500 ou 1000 euros pour être mis en œuvre. Pour travailler avec les habitants et les associations pour l’accès aux droits, à la langue française, à la culture, au numérique, pour travailler à une gestion urbaine de proximité, bref tout ce qui participe au mieux « vivre ensemble ».

 Deuxièmement, la Ville de Paris doit agir, par une politique de développement de ces territoires, en renforçant ses actions dans ces quartiers, que ce soit en matière de logement, de santé, d’équipements publics sportifs et culturels, de renouvellement urbain (GPRU et nouveau programme national de renouvellement urbain). 
Je tiens d’ailleurs ici à saluer le travail impulsé par Jacques Baudrier en ce sens : la création de nouveaux équipements publics dans les quartiers populaires permettra d’améliorer le maillage des services sur le territoire pour les Parisiens.

Si la Ville de Paris peut se permettre de prioriser les quartiers populaires dans les investissements réalisés, c’est avant tout parce que Paris a fait le choix de l’investissement face à celui de l’austérité. La politique de la ville ne peut prétendre à l’efficacité dans le cadre d’une politique « austéritaire » de droit commun.

Sur le 4ème pilier, que nous allons ajouter à ce contrat, par un avenant sur la citoyenneté et les valeurs de la République suite au comité interministériel du 6 mars dernier, disons le franchement la ville de Paris ne pourra pas agir seule pour faire vivre la citoyenneté et l’égalité au niveau des enjeux posés.

Depuis janvier, l’Etat a largement sollicité les associations. Mais attention aux injonctions contradictoires ! Rappelons-nous que les adultes-relais sollicités aujourd’hui pour faire vivre la citoyenneté ont vu leur financement diminué de 4 000 € par an par l’Etat en 2013 après que la politique de la ville ait vu ses moyens globaux amputés de 31% de 2009 à 2012 sous le gouvernement FILLON-SARKOZY.

Gardons à l’esprit que celles et ceux qui sont sollicités aujourd’hui pour faire vivre les valeurs républicaines sont ceux qui doivent de plus en plus faire appel à des financements privés pour pallier aux baisses des subventions publiques.

Soyons honnêtes sur la question de l’appartenance à la communauté nationale. Et je vous en parle notamment car nous avons été interpellés sur cette question par les associations lors du séminaire organisé par la Préfecture en février sur « la mobilisation de la citoyenneté ».

Comment pouvons-nous demander à nos partenaires associatifs de faire en sorte que les jeunes des quartiers se sentent inclus dans la communauté nationale alors que, et contrairement à certains engagements de campagne, ils n’ont toujours pas le droit de vote ?

L’appartenance à la République ne doit être pas être à géométrie variable, elle ne peut se limiter à des devoirs du citoyen, elle doit aussi être assortie de droits. 
Dans le même état d’esprit nous sommes très inquiets quant à la possible réduction des moyens de l’Etat sur l’apprentissage du français. Aucune ambition ne peut exister en terme de politique d’intégration sans accompagnement fort en matière d’apprentissage de la langue. Sur le terrain c’est souvent le point d’entrée de l’accès au droit.

Oui ces politiques ont un coût. Mais le coût de l’abandon de ces actions et donc de certains quartiers, serait bien plus élevé pour la société dans son ensemble.

Je vous remercie,

 

 

Ancien conseiller de Paris, en charge de la Politique de la ville et de l’intégration. (2014-2020)