Article de Vie locale - Publié le Mardi 2 Février 2016

Oui au nouveau Lariboisière, mais pas amputé de ses activités gériatriques !

  • Dante Bassino, adjoint PCF du 10ème, entouré de Didier Le Reste, Nicolas Bonnet et Raphaelle Primet, conseiller-es de Paris, lors du rassemblement du 11 mars 2015 devant l'hôpital Lariboisière pour rappeller leur attachement à une santé publique de qualité et de proximité.

Le 26 janvier 2016, les conseils de quartier Louis Blanc/Aqueduc et Lariboisière/Saint­Vincent de Paul ont organisé une réunion publique sur l'avenir de l'hôpital Lariboisière. Près de 150 personnes ont participé à cette réunion. Pour débuter, Eve Parier, directrice générale du groupe hospitalier Lariboisière/Saint­Louis/Fernand Widal, et Bernard Jomier, adjoint à la Maire de Paris en charge de la santé, ont présenté leur projet.

Eve Parier a insisté sur la nécessité de construire un nouveau bâtiment, le site actuel de Lariboisière n'étant pas aux normes. De plus, le but serait de moderniser l'hôpital en développant l'ambulatoire. Elle a rappelé qu'un financement de 316 millions d'euros a été adopté en juillet 2015 (290 millions pour les travaux et 26 millions pour les équipements). 30 % de ce budget est assuré par le gouvernement, le reste par l'AP­HP et la vente prévue des terrains de Lariboisière, près d'un tiers de l'hôpital actuel. Les travaux se dérouleraient entre 2017 et 2024.

Pour l'offre de soins, Lariboisière garderait un grand centre d'urgence et verrait son plateau technique développé avec 73 lits de soins critiques. Pour la gériatrie, il resterait seulement une unité de gériatrie aigüe. Les soins de suite seraient délocalisés à Claude Bernard, dans le 18ème, près du périphérique.

De nombreuses interrogations, voire même des craintes, se sont ensuite exprimées dans la salle, même si toutle monde a salué qu'un budget soit enfin disponible pour mettre aux normes l'hôpital. Dante Bassino, adjoint PCF au maire du 10ème, s'en est fait le relais et a interrogé quant à l'avenir de la maternité : 20 % de naissances supplémentaires sont prévues, mais une augmentation de lits d'hospitalisation est­-elle prévue pour éviter que la maternité devienne une « usine à bébés » où la femme sort avec son enfant dès l'accouchement fini ? Là-­aussi, aucune réponse précise n'a été apportée. Eve Parier se contentant de dire qu'il y aurait une augmentation de lits d'hospitalisation, sans préciser combien ni leur localisation dans l'hôpital.

Mais c'est surtout la disparition des lits de gériatrie, aujourd'hui localisés à Fernand Widal, qui suscite des inquiétudes. Jean­-Pierre Leroux, ancien adjoint PCF du 10ème, a rappelé les engagements passés : « Lors de la réunion publique du 5 décembre 2011 qui s’est tenue à l’école Louis Blanc, la directrice de l’AP­HP, Mireille Faugère, avait présenté un plan de réorganisation des hôpitaux Fernand Widal et Lariboisière qui avait fait consensus, après de longues négociations. Ce plan avait été présenté en présence de près de 200 habitants du quartier et en présence du maire du 10e et de Mme Hidalgo. Ce plan prévoyait le transfert de toutes les activités de Fernand Widal dans l’hôpital Lariboisière, transfert rendu possible grâce à la construction d’un nouveau bâtiment à Lariboisière. J’avais fait part de mon adhésion à ce projet qui maintenait l’offre de soins, mais j’avais demandé si l’ensemble des 150 lits de soins de suite et de réadaptation et ceux de soins de longue durée concernant plus particulièrement les personnes âgées seraient bien maintenus dans leur totalité. Il m’avait été répondu que le transfert serait fait au lit près. J’étais totalement rassuré». Cet engagement avait été réitéré dans le programme de Rémi Féraud lors de la campagne municipale de 2014. Or, aujourd'hui, ces 150 lits ne sont plus transférés à Lariboisière. Cette décision de ne pas augmenter les capacités d’accueil en gériatrie est invraisemblable, au moment où les personnes nées après­ guerre vieillissent et où l'espérance de vie en mauvaise santé n'a jamais été aussi forte.

Le Dr Nizard, président de la Commission médicale de Lariboisière, a reconnu que « le projet de soins devait s'adapter aux besoins des populations ». Tout à fait d’accord, mais ce n'est pas ce qui est prévu ; car cela nécessiterait d’ouvrir davantage de lits de gériatrie (pourquoi pas à Claude Bernard) et de ne pas fermer les services existants. Un tel choix reviendrait à confier les soins des personnes âgées au secteur privé qui pratique des coûts très élevés, inaccessibles aux personnes âgées moins favorisées. Une municipalité de gauche peut­elle cautionner une telle orientation ?

Pour justifier le refus de transférer les lits de gériatrie à Lariboisière, le Dr Nizard a précisé que seuls 25 % des patients actuels en gériatrie viennent du 10ème arrondissement, mais oublie de mentionner que la majorité des autres proviennent essentiellement des arrondissements mitoyens (9ème, 18ème et 19ème). En effet, Lariboisière est situé au centre de ces quatre arrondissements, avec une desserte aisée grâce aux différents modes de transport en commun disponible à la gare du Nord. Au contraire, Claude Bernard est excentré par rapport à la localisation des patients actuels et avec une desserte difficile en transports, surtout pour des personnes âgées. L'inaccessibilité territoriale est l'un des facteurs les plus importants du renoncement aux soins : il est important de garder ces lits à Lariboisière.

Sur le plan financier, le transfert à Lariboisière des lits pour les personnes âgées ne représenterait qu’un surcoût de 5 % du budget prévu pour le nouvel hôpital, mais contraindrait à renoncer à la vente de la partie ouest de Lariboisière. Enfin, si les personnes âgées sont dirigées vers Claude Bernard, les soins et les examens seront effectués à Lariboisière, ce qui nécessitera de multiples transferts en ambulance, sources de fatigue pour les patients et de dépenses considérables pour la Sécurité sociale. Une aberration économique !

Quant à Bernard Jomier, il a rappelé la volonté de la Mairie de Paris de réorienter l'offre de soins vers le Nord/Est de Paris et de lutter contre les inégalités territoriales de santé entre Paris et la Seine­-Saint­-Denis. Un objectif louable, mais contestable dans sa mise en œuvre : on ne lutte pas contre des inégalités en déshabillant Pierre pour habiller Jacques. Les communistes soutiennent la création d'un hôpital à Saint-Ouen, mais pas à la place des hôpitaux actuels (Bichat, Beaujon...).

On ne lutte pas contre les inégalités territoriales de santé en opposant les territoires les uns aux autres, mais bien plutôt en les additionnant les uns avec les autres. C'est toute une logique territoriale de santé qui doit aujourd'hui être revue à Paris et en Ile­-de­-France. Cette nouvelle logique doit placer réellement les besoins des patients avant les logiques financières et concrètement cela passe déjà par la réintégration des lits de gériatrie dans le projet de Nouveau Lariboisière.