Article de Vie locale - Publié le Samedi 30 Mars 2013

Salle de Consommation à Moindre Risque : une concertation en bonne voie, à poursuivre avec les habitants !

Mercredi 27 mars 2013, une première réunion de concertation s'est tenue à la mairie du 10ème à propos de l'ouverture d'une Salle de Consommation à Moindre Risque (SCMR). Un projet attendu depuis des années par certains, source d'inquiétudes, voire de rejet pour d'autres. La salle des fêtes était remplie pour cette occasion.
  • Près de 200 habitants du 10ème ont participé à la première réunion de concertation organisée en mairie à propos de l'ouverture envisagée d'une salle de consommation de drogue près de la gare du Nord.

En ouverture de la réunion, Rémi Féraud, le maire du 10ème, a confirmé la volonté d'implanter cette salle dans le quartier de la Gare du Nord, secteur le plus fréquenté par les consommateurs de drogue (30% des récupérations de seringues usagées de Paris y sont effectuées). Il a néanmoins rappelé qu'aucune implantation n'avait pour le moment été choisie. L’endroit recherché ne devrait pas être trop proche de lieux d'habitation. Il a également rappelé les expériences étrangères qui ont démontré l'utilité d’une telle salle.

Puis Elisabeth Avril (association Gaïa, chargée de piloter le projet) a précisé les modalités de fonctionnement de la SCMR : elle sera ouverte huit heures par jour, avec la présence d'assistants sociaux et d'infirmiers. Ce sont huit emplois qui seront créés pour le fonctionnement de cette salle.

Sylvie Wieviorka et Myriam El Khomri, adjointes à la ville de Paris, ont confirmé le soutien du Maire de Paris. Mme El Khomri, chargée de la sécurité, a confirmé que l'ouverture de la salle sera liée à une hausse des effectifs policiers dans l'arrondissement. Un médecin de l'hôpital Lariboisière a, quant à lui, expliqué l'utilité d'une telle salle et pourquoi elle ne pouvait être intégrée à l'hôpital : beaucoup de toxicomanes, ne se considérant pas comme malades, refuseraient de se rendre à l'hôpital. La salle de consommation peut être un moyen de les faire entrer dans un circuit de soins.

La parole a également été donnée aux habitants. A part quelques militants UMP venus pour créer du chahut, la salle était partagée entre soutien au projet, inquiétude voire opposition, mais avec toujours un esprit d’écoute et d’ouverture au dialogue.

Des prises de paroles d’habitants inquiets de la future ouverture de la SCMR témoignaient d’ailleurs d’une réelle volonté de trouver une solution sanitaire pour les usagers de drogues, ne demandant qu’à être certains que la SCMR est une bonne solution pour cela.

De nombreux habitants du 10ème ont fait part de leur espoir de voir cette salle ouvrir. S'exprimant au nom du Parti communiste de l’arrondissement, Dante Bassino a expliqué que « face à la réalité de ce problème, il fallait soutenir les tentatives de le résoudre intelligemment plutôt que de chercher à le déplacer ». Il a ajouté que le dispositif de cette salle de consommation « devrait être évalué de manière transparente pour l’ajuster à la réalité ou pour revenir sur son ouverture si elle devait créer plus de problèmes qu’elle n’en résout ».

Alain Lhostis, qui porte ce projet en tant qu'élu communiste depuis de nombreuses années, a rappelé que « loin d'être des lieux de plaisir, ces salles sont d'abord des lieux de souffrance, celle de personnes en déshérence qui auront, avec cette structure, la possibilité d'accéder aux soins ».

Pour la section PCF qui soutient le projet d’une SCMR, l’ouverture est en bonne voie. Les nombreuses prises de parole ont montré la nécessité de cette démarche de concertation. Elle devra se poursuivre, en particulier avec les habitants du quartier de la gare du Nord, pour que la création de cette salle puisse avoir lieu le plus rapidement possible et pour lui donner les plus grandes chances de réussite possible. C’est de cette manière qu’elle remplira ses deux objectifs : baisse drastique des risques pour les usagers de drogues et amélioration de la tranquillité et de la sécurité des habitants.

 

Quelques questions ou remarques venues au cours des débats et les éléments de réponses que le PCF souhaite apporter :

.Quel est le but de cette salle ?

Le but est de faire diminuer les risques pour les usagers de drogues, leur donner accès à des conseils, à un suivi social et, le jour où ils y sont prêts, aux soins pour arrêter leur consommation. La salle poursuit un second objectif : améliorer la tranquillité des habitants.

.Il vaudrait mieux les chasser !

Déplacer un problème ne l’a jamais résolu. Au contraire, les politiques de prévention des risques (distribution de seringues, informations…) ont permis une baisse des overdoses et des contaminations par le virus du Sida ou l’hépatite. Ce sont autant de risques en moins pour les drogués mais aussi pour les habitants. Cette salle est le prolongement de ces actions de réduction  des risques.                              

.Pourquoi dans le 10ème ? Pourquoi dans le quartier de la gare du Nord ?

Parce que c'est là que le problème est le plus criant, mais nous espérons que, si la SCMR montre son utilité, d’autres salles pourront ouvrir ailleurs en France, là où le besoin s’en fait sentir.!

.La situation dans le quartier de la gare du Nord ne cesse de se dégrader, il faut agir !

Cela fait de nombreuses années que la drogue est présente dans notre arrondissement. Mais ce qui est vrai aussi, c’est que les quartiers touchés ont changé : il y a 30 ans la consommation était plus faible autour de la gare du Nord et bien plus forte dans le sud de l’arrondissement ou vers la place Stalingrad. C’est bien en partant de ce constat que le quartier a été choisi. La salle a le plus d’utilité là où se trouvent les problèmes !

.il faut appeler un chat un chat: ce que vous voulez créer, c'est une salle de "shoot"!

Le raccourci est tentant, c'est vrai. Mais les mots ont un sens.Une salle de shoot serait une salle en libre accès permanent, sans aucune présence pour réguler son fonctionnement. Les buts de la SCMR, au contraire, sont d'accueillir et d'informer les usagers, avant de pouvoir ensuite orienter ceux qui sont prêts vers des traitements et aussi d'améliorer la tranquillité des habitants.C'est parce que l'expression "Salle de consommation à Moindre Risque" correspond aux buts que nous recherchons que nous l'utilisons et non pas pour faire plus "propre" et encore moins pour tromper les habitants.

.N’est-ce pas risquer de confronter nos enfants à la drogue que d’ouvrir cette salle ?

Ils le sont plus encore lorsque les personnes consomment en pleine rue devant eux !

.Les dealers vont venir en masse !

Les dealers sont déjà présents. Si la salle permet à une partie des usagers de se soigner, la consommation de drogue baissera et le nombre de dealers avec !

.Est-ce que la drogue leur sera fournie ?

Non, ni la mairie, ni l’Etat, ni les associations ne distribueront de la drogue. Les usagers viendront avec leur produit.

.Ils ne viendront pas s’il y a des policiers. Donc, vous allez créer autour de cette salle une zone où vous demanderez à la police de ne pas venir !

Aujourd’hui les policiers, bien qu’en nombre insuffisant, sont présents dans le quartier. Cela n’empêche nullement les usagers de se droguer dans les parkings, voire dans la rue qui est aujourd’hui la salle de consommation à risques maximum !

.Il vaudrait mieux les soigner plutôt que de les inciter à consommer !

Il n’est évidemment pas question d’inciter qui que ce soit à se droguer. Quel élu ou responsable associatif pourrait y avoir un quelconque intérêt ? Les salles ne sont pas des lieux accueillants pour quelqu’un qui ne consomme pas. La souffrance y est palpable.

Il faut permettre aux consommateurs de rencontrer des personnes qui peuvent répondre à leurs interrogations. Et il faut laisser aux associatifs et aux personnels sociaux, le temps de gagner la  confiance des usagers avant de pouvoir les orienter, lorsqu’ils seront prêts pour cela, vers des solutions pour arrêter la drogue.

.Combien ça va coûter ?

Il est en fait bien difficile de répondre à cela. Car la réponse ne se limite pas au coût du local, des heures de travail et du matériel. Il faut prendre en compte le bénéfice économique, humain et social si la salle atteint ses objectifs : moins d’hospitalisations pour overdose et maladies, moins d’agressions, moins de consommation, moins de personnes en errance, donc moins d’aides sociales … En fait, plus la salle remplira son objectif, moins elle coûtera cher et peut-être même rapportera-t-elle non seulement sur le plan social et humain mais également sur le plan économique. Pour cela l’adhésion d’un maximum de riverains et d’habitants du 10ème est nécessaire.

.La salle va attirer tous les drogués d’Ile de France !

Il y a de nombreuses « catégories » de drogués aux drogues dures. Il y a, par exemple, des personnes assez favorisées qui consomment de manière « festive ». D’autres se recrutent massivement chez ceux qui subissent d’énormes pressions physiques et morales à leur travail. L’exemple des personnes travaillant dans la restauration est bien connu.

Ceux présents dans le quartier sont très majoritairement des personnes très précarisées et en errance, qui se sont « fixées » dans le quartier.

C’est à notre avis à cette dernière population, qui fait également peur par son exclusion sociale, que la question fait surtout référence.

Cette population se déplace très peu, du fait de ses finances, de son état social, de son manque d’information et d’autonomie.

Si on ne peut pas affirmer qu’aucun drogué qui ne fréquente pas déjà le quartier ne sera présent, notre analyse, ainsi que les expériences étrangères, démontrent que ce risque est très faible. Mais il faudra savoir ajuster le dispositif et, si l’expérience en montre le besoin, il faudra déplacer la salle ou en ouvrir d’autres ailleurs dans Paris ou en banlieue !

Par contre, si des personnes « mieux insérées socialement » viennent, nous ne pourrons que nous en féliciter : nous préférons qu’elles viennent consommer dans la salle prévue pour cela plutôt que chez elles au risque de se faire surprendre par leurs enfants. Et elles aussi pourront accéder au parcours de soin. Elles aussi en ont besoin !