Article de Vie locale - Publié le Jeudi 16 Février 2017

« La troisième guerre mondiale est sociale »

  • Le 1er février, Bernard Thibault, membre du Conseil d'administration de l’OIT, a présenté  son livre dans le 10ème, répondant à l’invitation de Didier Le Reste et de Jocelyne Clarke, candidats communistes dans la 5ème circonscription. Un moment d’échanges sur la guerre menée au niveau international contre les droits et pouvoirs des salariés pour le grand profit du capital.

     

     

     

C’est le titre du livre* que Bernard Thibault a présenté le 1er février au Centre culturel kurde de la rue d’Enghien, répondant à l’invitation de Didier Le Reste et de Joceline Clarke, candidats PCF dans la 5ème circonscription.

« Le travail n’est pas une marchandise »…ce que l’on a pris coutume d’appeler « Marché du travail » n’a par conséquent aucune existence concrète ni légitime. Cette affirmation, article premier de la Déclaration de Philadelphie de 1944 signée à l’initiative de l’OIT (Organisation Internationale du Travail), est l’une des nombreuses vérités méconnues que nous révèle le livre choc de Bernard Thibault, membre actuel du conseil d’administration de l’OIT, après avoir été secrétaire général de la CGT de 1999 à 2013. Livre qui déroule devant nous la photographie d’un monde du travail profondément inégalitaire en état de véritable « guerre sociale ». Un monde où l’obsession du profit poursuivi par quelques multinationales règne en maître sur des milliards de femmes, d’hommes et d’enfants ; où les droits et pouvoirs des travailleurs sont systématiquement rognés, remis en cause, ignorés et font l’objet d’un combat de chaque instant. Un monde du travail planétaire d’une violence que l’on a peine à imaginer.

Priorité aux besoins humains et sociaux

 Quelques phrases, porteuses du sens et de la philosophie qui ont présidé à la création de l’OIT par une volonté des Etats au lendemain de la première guerre mondiale dans le cadre du Traité de Versailles, résonnent singulièrement aujourd’hui en 2017. Alors même que la France se hisse cette année au 3ème rang mondial pour ce qui est du montant des dividendes versées aux actionnaires et que le nombre d’emplois précaires et de travailleurs pauvres explose dans notre pays. La Déclaration de Philadelphie se donne ainsi comme objectif premier de « promouvoir la justice sociale dans le monde, considérée comme un facteur déterminant de la paix universelle », mais aussi de « consacrer la priorité des aspects humains et sociaux sur les considérations économiques et financières » et elle atteste que « toute zone de pauvreté est une menace pour la prospérité de tous ».  L’OIT, reconnue comme seule Agence « Sociale » rattachée aux Nations Unies, compte aujourd’hui 186 pays adhérents dont 28 membres votants et 10 Etats (dont la France) qui sont dotés d’un siège permanent.

L’action de l’OIT s’exerce très concrètement sur plusieurs plans : elle a édicté 8 conventions dites « fondamentales » qui fixent les principes d’une législation internationale du travail : liberté syndicale, égalité salariale, interdiction du travail forcé, abolition du travail des enfants ou encore élimination de toute forme de discrimination en matière d’emploi. Elle se bat pour la reconnaissance des droits sociaux de la personne comme partie intégrante des droits humains. Mais surtout, l’OIT représente le seul contrepoids social de dimension internationale réel qui s’oppose aux logiques et aux puissances commerciales et financières incarnées par le FMI, l’OMC, le G20 ou la Banque Mondiale dans leurs velléités de décider à leur guise de la gouvernance mondiale.

 Les droits et les pouvoirs des travailleurs aujourd’hui : un enjeu majeur de la campagne du PCF

Tout le monde garde en tête la lutte âpre mais finalement victorieuse menée dans notre arrondissement du 10ème   par les travailleuses et travailleurs sans papiers des salons de beauté du Boulevard de Strasbourg dans le quartier Château d’Eau. Didier Le Reste, candidat PCF aux législatives et sa suppléante Jocelyne Clarke rappellent opportunément cette expérience concrète et encore actuelle où représentants syndicaux (la CGT) et militants politiques (le PCF) ont conjugué leurs forces pour combattre l’esclavage moderne et la dérégulation sociale.

 Le candidat rappelle à cette occasion les nombreuses propositions sur cette question du travail présentées dans le livre programme du PCF « La France en commun » : mettre en œuvre le projet de loi Chassaigne de valorisation et de sécurisation des parcours professionnels qui appréhende dans une même volonté politique les périodes d’emploi et de formation pour une véritable sécurité sociale professionnelle pour chacun qui se déploie tout au long de la vie. Garantir la durée légale du travail à 35 heures et aller vers les 32 heures. Donner des droits et pouvoirs nouveaux aux salariés et à leurs représentants dans et hors de l’entreprise comme le droit de suspendre un projet patronal de plan social dès lors qu’il existe un contre projet présenté par les salariés. Conditionner toute somme versée par l’Etat aux entreprises comme le CICE et en cas de non respect des engagements, en exiger le remboursement. Didier Le Reste dénonce également le faux problème mis en avant par la droite du « coût du travail » face à la réalité, elle bien tangible, du coût du capital, de la spéculation financière et de la fraude fiscale comme le montre de façon éclatante le livre des frères Bocquet « Sans domicile FISC ». Il rappelle enfin la question cruciale du statut du contrat de travail au cœur de la désastreuse loi El Khomri et les dangers de la précarisation et la menace d’une Uberisation généralisée de l’ensemble des secteurs de la société. Bernard Thibault lui emboîte le pas en citant l’une des statistiques les plus significatives du rapport de l’OIT présenté dans son livre : en 2016, au niveau mondial,  plus de 50% des personnes actives travaillaient sans contrat de travail d’aucune sorte. La soirée, riche et passionnante, se clôt par une discussion avec l’assistance, nombreuse et activement participante.

 1] La troisième guerre mondiale est sociale, Bernard Thibault, Editions de l’Atelier 2016