Article de Politique nationale - Publié le Dimanche 2 Juillet 2023

Vous n’avez réclamé ni la gloire ni les larmes ….

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    Dessin d’Ernest Pignon-Ernest en hommage à Missak Manouchian, poète, résistant communiste et commandant militaire des FTP-MOI. Il fut exécuté au Mont Valérien le 21 février 1944 par l’occupant nazi avec ses camarades. Dans un poème, Louis Aragon écrivait : « ils étaient vingt et trois étrangers et nos frères pourtant. Vingt et trois amoureux de vivre à en mourir ».  La récente annonce de l’entrée au Panthéon de Missak Manouchian et de sa femme Mélinée est un geste fort de reconnaissance de la résistance communiste pendant la seconde guerre mondiale.

80 ans ! Il aura fallu attendre 80 ans pour que soit enfin reconnue et honorée la résistance communiste et tout particulièrement celle de ceux qui, nés en terre étrangère, se sont battus pour libérer la France du joug nazi.

Missak Manouchian, tout comme sa compagne, Mélinée, rescapés tous deux du génocide arménien perpétré par la Turquie, avaient choisi de s’établir en France, pays des Lumières et des Droits de l’Homme.

Pour arriver ici, Missak a traversé la méditerranée, comme aujourd’hui ces migrants pour qui la mer devient leur cimetière. Comment ne pas faire un parallèle entre ceux qui arrivent aujourd’hui et ceux qui, hier, ont donné leur vie pour la Liberté, celle dont nous jouissons aujourd’hui.

Non, toutes ces femmes, tous ces hommes, qui au péril de leur vie arrivent jusqu’à nous, ne sont pas un poids pour notre société. N’en déplaise aux racistes de tous bords comme Zemmour et Le Pen, ce sont des femmes et des hommes comme nous, ni meilleurs ni moins bons. Ils peuvent être pour notre pays une richesse supplémentaire pour peu qu’on les reçoive avec dignité et qu’on accepte de leur faire une place dans notre société.

Honorer la mémoire d’un résistant né hors de France est assurément légitime car à travers Missak Manouchian ce sont tous les combattants d’origine étrangère qui ont combattu la barbarie que l’on honore. Mais comment accepter que, dans le même temps, soit en préparation une loi qui va rendre encore plus difficile la vie des immigrés. Comment accepter que l’on accroisse encore les moyens de Frontex, machine à repousser les migrants. Comment accepter que la France, condamnée à plusieurs reprises par la cour de justice européenne, continue d’enfermer dans les centres de rétention des personnes n’ayant commis aucun délit et pire encore des enfants.

Honorer la mémoire de Missak et Mélinée Manouchian, au-delà de leur panthéonisation, serait de mettre enfin en place une politique d’accueil digne et donner les moyens à tous les migrants de réaliser leur rêve : construire leur vie dans un pays qui les reconnait pour ce qu’ils sont des hommes et des femmes.