Article de Politique nationale - Publié le Lundi 27 Avril 2020

Quelle efficacité sociale et environnementale pour l’argent public ?

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    Alors que le gouvernement a décidé de lui attribuer une aide de 7 milliards d’euros sans aucune contrepartie sociale et environnementale, Air France vient d’annoncer un plan de départs volontaires. Une fois de plus, l’Etat verse sans aucun contrôle de l’argent à de grandes entreprises qui en profitent pour mettre en œuvre des plans de licenciements ou qui servent à gonfler les dividendes aux actionnaires. L’argent public doit servir à l’emploi, à la formation et au développement des entreprises et doit être placé sous le contrôle des salariés, des usagers et des élus.

Deux informations récentes viennent se télescoper et faire douter des propos lénifiants du Président de la République sur sa volonté d’impulser des changements dans sa politique.

Le premier, révélé par l’Humanité du 24 Avril, évoque le hold–up de 30 millions d’euros réalisé par l’Etat sur la réserve de « L’Agence Nationale des Chèques Vacances ».

Cette organisation, qui gère l’épargne des salariés les plus modestes pour leur permettre d’accéder à des lieux de séjour ou de loisirs, organise aussi le départ de 260 000 personnes, chaque année, parmi les plus fragiles : personnes isolées, familles mono parentales, personnes handicapées. Cette ponction va servir à alimenter un fonds décidé par E. Macron d’aide aux TPE et PME. C’est donc une partie de l’épargne des salariés qui permettra de venir en aide aux petites entreprises.

Pour les plus grosses d’entre elles, on a su trouver l’argent : Renault recevra quelque 5 milliards et Air France 7 milliards. Mais ce qui est choquant, c’est que ces fonds soient attribués sans aucune contrepartie, ni aucune exigence vis à vis de la politique déployée par ces entreprises.

M. Orphelin, député ex-LREM, le dénonçait hier 26 avril sur l’antenne de France inter. Il aurait souhaité que le gouvernement assortisse cette aide de contraintes écologiques. On pourrait légitimement exiger que des contraintes sociales leur soient aussi imposées.

Et voilà que l’on apprend que, fort de ce soutien en argent public, le PDG d’Air France annonce un plan de départs volontaires. Le redémarrage de l’entreprise se fera donc à moyens humains comprimés. Une fois de plus, des fonds publics sont attribués aux entreprises, et singulièrement aux plus importantes, sans aucun contrôle sur les politiques de ces entreprises.

Ainsi en est-il de l’emblématique CICE (Crédit d’Impôt pour la Compétitivité et l’Emploi). Chaque année, ce sont environ 20 milliards qui sont distribués.  En 2016, 256 entreprises de plus de 5 000 salariés se sont partagé un peu plus de 5 milliards d’euros du CICE, alors même que les bénéfices de certaines se comptaient, cette année là, en centaines de millions, voire en milliards d’euros et que leurs dirigeants percevaient de confortables rémunérations.

Ainsi Total, dont le PDG touche entre 3 millions et 4 millions d’euros par an, a enregistré un profit de 4,2 milliards d’euros après avoir reçu 29 millions de CICE. Sans compter les scandales d’entreprises telles Auchan, Sanofi ou Carrefour, qui bénéficiaient de ces aides pour la création d’emplois et   …qui ont licencié, en toute impunité bien sûr. Sans qu’il leur soit demandé des comptes !

Au delà du CICE, il existe toutes sortes d’autres aides publiques aux entreprises, tels les allégements Fillon, les subventions ou le Crédit d’Impôt Recherche … sans qu’il soit possible d’évaluer leur impact réel.

Si l’on veut vraiment changer de paradigme, si l’on veut une société plus juste et plus solidaire qui reconnaisse une vraie valeur au travail, qui donne toute sa valeur à l’efficacité sociale et écologique, il est temps d’en finir avec ces largesses faites sans contrôle.

 Il est temps d’exiger que ces fonds soient attribués en toute transparence, avec une évaluation de leur impact et sous le contrôle des représentants syndicaux et associatifs, en lien avec les élus des collectivités territoriales.